Malmené durant le Covid, Lime retrouve des ambitions et fait évoluer son modèle. Son CEO, issu d’Uber, son actionnaire principal, fait le point sur son business et ses projets.
Wayne Ting. Notre mission est de bâtir une solution de transport alternative aux voitures, à savoir une mobilité partagée, peu onéreuse et neutre en émission de CO2. Le développement des voitures électriques est, certes, une avancée mais ne va pas résoudre le problème du climat. La raison à cela est qu'il s'agit de véhicules lourds consommant beaucoup d'énergie. Dans la majorité des cas, ces voitures ne servent qu'à déplacer une seule personne alors même qu'elles remplissent nos villes une fois stationnées. Lorsque vous vous déplacez seul en ville sur une courte distance, l'usage d'un vélo ou une trottinette électrique, combiné aux transports en commun, est la meilleure option. Nous croyons en un monde dans lequel la mobilité-as-a-service sera une solution pour la majorité des citadins.
Exactement. Dans une ville comme Paris, la plupart des trajets débutent ou se terminent avec les transports en commun. Lime est utilisé comme un complément. C'est pour cela que nous misons beaucoup sur des intégrations avec les applications des opérateurs de transport public comme celles de la RATP. Les usagers peuvent ainsi louer l'un de nos vélos ou trottinettes électriques pour faire une connexion sur une étape de leur trajet. Ces intégrations évitent d'utiliser deux applications différentes et de devoir acheter plusieurs titres de transport. Ma conviction est qu'une solution comme la nôtre incite davantage de personnes à utiliser les transports en commun.
La rentabilité de l'entreprise est un aspect primordial à mes yeux car nous voulons développer Lime sur le long terme. Lorsque je suis devenu CEO de Lime, c'était une période difficile pour tout le monde, notamment en raison des confinements successifs liés à la crise du Covid. Les gens étaient confinés chez eux et les start-up du secteur de transport comme la nôtre n'avaient pas la côte auprès des investisseurs. J'ai dû prendre des décisions difficiles en réduisant les effectifs et en nous retirant d'une douzaine de marchés. Lime opère désormais dans plus de 200 villes sur les cinq continents et comptabilise plus de 250 millions de trajets réalisés. L'entreprise emploie 700 salariés dans le monde.
"Nous allons bientôt nous implanter à Octeville-sur-mer"
Paris est aujourd'hui le premier marché mondial de Lime avec plus de 35 millions de trajets effectués depuis son lancement. Nous sommes aujourd'hui présents dans d'autres grandes villes françaises comme Marseille ou Bordeaux mais aussi dans des communes de taille plus modeste comme Le Havre. Cette commune de 170 000 habitants a obtenu, pendant plusieurs mois, le plus haut taux de trajets quotidiens par véhicule à travers le monde. Ce chiffre nous a beaucoup surpris et a également validé qu'il existait une vraie demande pour notre solution même dans des villes de taille moyenne. Il faut dire que, dans ce type de communes, l'usage des transports en commun est parfois moins aisé que dans les grandes villes, ce qui rend les déplacements sans voiture plus compliqués.
Nous les contactons et nous leur montrons que notre solution peut s'adapter à leurs besoins, peu importe la taille de la ville. Nous allons bientôt nous implanter à Octeville-sur-mer, une ville de moins de 6 000 habitants. C'est une première mondiale pour Lime ! Si nous arrivons à démontrer qu'il existe une demande pour Lime dans une si petite commune, alors le potentiel en termes de marché deviendra véritablement immense. La France fait partie des pays qui ont accueilli à bras ouverts ces nouveaux services de mobilités partagées et décarbonées tels que Lime. En moyenne à Paris, une trottinette démarre un trajet toutes les 6 secondes, et 9 secondes pour les vélos.
Nous nous différencions à différents niveaux : avec notre software et hardware propriétaires mais aussi avec notre mode opérationnel unique. A Paris par exemple, toutes nos opérations sont regroupées au sein d'un seul entrepôt : stockage de nos vélos et trottinettes, atelier de réparation, bureaux, etc. Côté software, nous avons développé notre propre logiciel de diagnostic permettant d'indiquer rapidement à nos mécaniciens l'origine d'une panne. Ces données nous permettent d'identifier rapidement les problèmes récurrents sur nos véhicules et donc de les améliorer.
Notre plateforme nous permet également de savoir à tout moment où se trouvent nos véhicules. Cette manne de data nous donne ainsi la possibilité de travailler avec les villes pour proposer des solutions de stationnement. Notre technologie permet aussi d'établir des zones où la vitesse de nos vélos et trottinettes est limitée. D'ailleurs, je ne suis pas convaincu que limiter la vitesse soit toujours l'option la plus sécure pour les usagers. Mais nous travaillons avec les villes pour trouver le bon équilibre.
"A Paris, notre nouvelle flotte de vélos et de trottinettes partage désormais la même batterie"
C'est effectivement l'une de nos principales différences avec nos concurrents. La plupart d'entre eux affirment concevoir leurs véhicules mais ce n'est pas vrai. Ils achètent en réalité des véhicules existants auprès de fabricants et changent simplement le logo. A Paris, nous sommes le seul opérateur à intégrer entièrement la R&D et la fabrication de nos véhicules. Maîtriser cette compétence en interne est primordial à mes yeux.
En effet, l'objectif des fabricants est de vendre davantage de trottinettes et de vélos électriques. Ils n'ont pas intérêt à améliorer la durabilité de leurs véhicules ou à réduire leur empreinte carbone. Il y a donc là une situation de conflit d'intérêt avec leurs clients opérateurs.  A l'inverse, nous concevons nos produits pour qu'ils procurent la meilleure expérience possible, qu'ils soient résistants et peu coûteux à réparer. A Paris, notre nouvelle flotte de vélos et de trottinettes partage désormais la même batterie, ce qui nous permet d'opérer plus facilement.
Uber est notre principal investisseur et siège donc à notre conseil d'administration. Nous avons la chance de compter parmi nos principaux investisseurs des entreprises comme Uber, Google, et quelques-uns des plus grands fonds de la Silicon Valley à l'instar d'Andreessen-Horowitz. Notre solution est intégrée dans la plateforme d'Uber, ce qui permet à ses utilisateurs de louer une trottinette ou un vélo électrique Lime. Cette intégration nous permet de toucher davantage de clients. Nous bénéficions également d'une intégration similaire au sein de Google Maps. Pour revenir à Uber, j'ai été effectivement chief of staff et je suis très proche du CEO Dara Khosrowshahi, qui est l'un de mes mentors. Pendant la période difficile de Covid que nous venons de traverser, ses conseils et feedbacks m'ont été précieux.
Nous ne contrôlons pas l'environnement macroéconomique. Et avec la guerre en Ukraine, il est impossible de prédire les conditions de marché dans les mois à venir. Mon rôle en tant que CEO est de préparer l'entreprise à une entrée en bourse en poursuivant notre croissance et en améliorant nos marges, sans pour autant savoir quand cela sera possible. D'une manière générale, si chaque citadin européen ou américain réussit à se déplacer en ville sans avoir à toucher une voiture, alors nous aurons accompli notre mission. Nous observons déjà des conducteurs délaisser leur voiture au profit de ces nouvelles solutions de micromobilité ou pour privilégier les transports en commun. Nous devons continuer à convaincre les villes qu'une alternative à la voiture est possible.
Wayne Ting est le CEO de Lime depuis mai 2020. Il rejoint l'entreprise en 2018 en tant que global head of operations and strategy. Avant cela, il avait passé quatre ans chez Uber, occupant différentes fonctions dont notamment celle de chief of staff auprès du CEO Dara Khosrowshahi. Auparavant, il avait été conseiller politique au sein du conseil économique national de la maison blanche sous l'administration Obama. Wayne Ting a également travaillé chez Bain Capital et au sein du cabinet McKinsey. Il est diplômé de Columbia University et de Harvard.

JDN. Comment est né le concept de Lime   ? Wayne Ting est le CEO de Lime © Izzy Dempsey Wayne Ting. Notre mission est de bâtir une solution de transport alternative aux voitures, à savoir une mobilité partagée, peu onéreuse et neutre en…
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