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Édition du 18 Janvier 2023
Édition du 18 Janvier 2023
Les grands opérateurs du Web vont progressivement restreindre l’accès aux données personnelles de leurs utilisateurs afin de se conformer aux nouvelles lois adoptées dans le monde. (Photo: Christin Hume Unsplash)
De la fin des témoins tiers (cookies) à l’arrivée du projet de loi 25, les entreprises québécoises font face à un mouvement de fond visant une meilleure protection des données sur le Web. Comprennent-elles l’ampleur de la révolution en cours ? Rien n’est moins sûr, si on se fie à la troisième édition de l’étude «Marketing numérique Québec», réalisée par Varibase avec la participation d’Eulerian et en partenariat avec Les Affaires.
Les réponses des entreprises — particulièrement les PME — témoignent d’un flagrant «manque de préparation». Premier voyant rouge au tableau: le fait que 35% des 202 entreprises québécoises sondées du 29 août au 19 novembre 2022 ont déclaré ne pas être conformes au projet de loi 25, dont les premières dispositions entraient en vigueur le 22 septembre dernier. Au sein des petites entreprises (revenus inférieurs à 1 M$), le pourcentage de non-conformité s’élève à 58%. «J’aurais pensé que les entreprises étaient mieux préparées que ça», admet Éric Azara, président de Varibase. Le dirigeant n’est pourtant pas défaitiste. «Comme les premières dispositions de la loi sont relativement simples à mettre en place, les retardataires pourront se rattraper.» Les nouvelles obligations incluent la nomination d’un «responsable de la protection des renseignements personnels» et la création d’un «registre d’incidents».
Le second volet de l’étude visait à mesurer le degré de préparation des entreprises quant à ce que les marketeurs appellent «la fin des témoins tiers», soit la décision des géants du Web de ne plus permettre l’utilisation des pisteurs de navigation à des fins de reciblage marketing.
À l’annonce de Google en 2019, des experts ont baptisé ce changement l’«apocalypse des cookies tiers». Depuis, la formule choc a perdu de son lustre. D’abord, l’entreprise californienne a reporté deux fois son projet — la nouvelle échéance étant 2024. Ensuite, il faut savoir que, selon Varibase, 47% des entreprises (71 % des petites) ne font pas de reciblage marketing. Et seulement 19% des entreprises (11% des petites) reposent entièrement sur des publicités Google et Facebook pour atteindre leur clientèle.
Il faut voir le phénomène dans son ensemble, explique Éric Azara. Les grands opérateurs du Web, soit les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon), vont progressivement restreindre l’accès aux données personnelles de leurs utilisateurs afin de se conformer aux nouvelles lois adoptées dans le monde.
«Les entreprises peuvent compenser la disparition des témoins tiers en mettant en place des processus pour collecter elles-mêmes de la donnée propriétaire», explique le dirigeant. Elles ne partent pas de zéro: selon l’étude, 85% affirment avoir déjà «mis en place une mécanique de collecte de données propriétaires». Globalement, les entreprises sondées évaluent ici leur degré de préparation à 4,1 sur 10. Le problème, note Éric Azara, c’est que la majorité se contente de l’effort minimal — soit demander des renseignements par un formulaire de contact sur le site web (61%), alors qu’une minorité profite de «chaque interaction»pour enrichir les profils clients (10%) ou a instauré une «collecte globale tout au long du cycle de vie» (14 %).
Le portrait s’assombrit au chapitre de l’«activation des données», où les entreprises s’accordent la plus basse note du sondage (2,8 sur 10). Si plusieurs ont mis en place des «scénarios d’automatisation marketing»(38 %), peu établissent des relations «interactives» (11%) et encore moins développent un parcours «global omnicanal» (8%). Par ailleurs, l’étude révèle un écart marqué entre le niveau de préparation des petites entreprises, dont la médiane globale est de 2 sur 10, et celui des moyennes entreprises (revenus de 1 M$ à 50 M$), qui double à 4 sur 10, ou celui des grandes entreprises (revenus supérieurs à 50M $), qui bondit à 5 sur 10.
«Ce qui est intéressant avec la fin des cookies, c’est que ça va forcer les entreprises à solliciter elles-mêmes leurs clients», lance Philippe Bussière, président de l’agence de marketing numérique Phare36. L’expert en automatisation marketing rappelle que la publicité Facebook n’est pas le seul outil de marketing numérique. «Les entreprises peuvent aussi utiliser des méthodes organiques, illustre-t-il, comme le référencement dans les moteurs de recherche ou la publication de contenu sur les réseaux sociaux, dans le but de rediriger des clients potentiels vers leur site web.»
Deux gains majeurs attendent les entreprises qui reprennent le contrôle de leur marketing numérique, annonce Éric Azara. «Le premier est financier, puisque l’entreprise n’a plus à payer les GAFA pour promouvoir ses produits. Le second a trait à la qualité de l’information collectée. En retirant le filtre imposé par les grandes plateformes, l’entreprise obtient une connaissance plus approfondie de sa clientèle.»Fortes de cette connaissance, les entreprises sont alors en mesure d’envoyer «le bon message, au bon moment, par le bon canal».
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Les résultats du sondage mené par Varibase démontrent que plus l’entreprise est grosse, plus sa maturité et sa préparation sont élevées. En effet, le score moyen des entreprises aux revenus inférieurs à 1 M$ est de 30 %. Pour les entreprises situées entre 1 M$ et 50 M$, la moyenne est de 42 %, alors qu’il monte à 45 % pour les entreprises aux revenus supérieurs à 50 M$.
À la question : « quelle mécanique de collecte de données propriétaires avez-vous mise en place ? », 61 % des entreprises participantes disent avoir mis en place « des formulaires collectant des données déclaratives à différents points de contact (création de comptes, inscription infolettre, téléchargement livre blanc, obtention d’un coupon rabais…) », alors que seulement 10 % ont implanté une collecte systématique à chaque interaction. 15 % des répondants n’ont pas encore systématisé la collecte de données propriétaires, alors que 14 % ont implanté une collecte globale tout au long du cycle de vie « via tous les canaux afin que l’utilisateur partage de manière proactive et volontaire des données déclaratives, transactionnelles, comportementales et intentionnelles afin d’obtenir la reconnaissance et le niveau de service qu’il attend de nous ».
À la question : « est-ce que votre collecte de données propriétaire est conforme à la loi 25 qui entre en vigueur en septembre 2022 ? », 49 % des entreprises sondées disent avoir identifié un responsable de la protection des renseignements personnels et établi son rôle et ses responsabilités ainsi qu’un comité d’accès à l’information et à la protection des renseignements personnels. 35 % répondent que leur projet de mise en conformité n’est pas encore à l’ordre du jour.
9 % sont même déjà en conformité avec la phase 2 de la loi avec la transparence et l’anonymisation des renseignements personnels alors que seuls 7 % respectent déjà les phases 1 et 2.
Lorsqu’on leur demande : « quelle est la solution la plus avancée que vous allez utiliser pour vos stratégies de reciblage ? » près de la moitié des entreprises (47 %) disent ne pas faire de reciblage. Près du quart (24 %) disent faire du reciblage contextuel avec les données propriétaires qui donnent une meilleure connaissance des utilisateurs, de leurs préférences et leurs intérêts. Le ciblage contextuel consiste à diffuser des publicités en fonction du contenu de la page pour cibler les bonnes personnes au bon moment dans les stratégies de publicité programmatique.
19 % des répondants font du reciblage fourni par les GAFA seulement et ont l’intention d’utiliser la nouvelle solution proposée par Google en nous appuyant sur son API TOPICS. Cette nouvelle fonctionnalité de ciblage par thématique est stockée entièrement sur l’appareil de l’internaute, sans faire appel à des serveurs externes, y compris ceux de Google.
D’un autre côté, 10 % font ce qu’on appelle du reciblage dynamique (DCO). L’optimisation dynamique de la création (DCO) est une technologie d’affichage publicitaire qui permet la création d’annonces publicitaires numériques (bannières, publicités, vidéos, etc.) ultrapersonnalisées en temps réel, dont le contenu est adapté à chaque individu, en fonction des éléments de contexte le concernant.
Les entreprises ont aussi été sondées sur leur niveau de transparence mis en application lors de la collecte de données. À cette question, 44 % des sondés disent devoir améliorer la transparence de leur collecte. 31 % utilisent un bandeau de consentement classique pour les témoins conforme à la loi 25 pour que l’utilisateur accepte la collecte de données de navigation et les témoins propriétaires. Chez 14 % des entreprises, il est facile et clair pour l’utilisateur de comprendre pourquoi les données sont collectées et ce dernier peut facilement choisir les informations qu’il souhaite ou non partager.
Pour une minorité d’entreprises (11 %), chaque utilisateur peut en tout temps accéder à la donnée que celles-ci savent sur lui. Il comprend pourquoi chaque donnée est collectée et son utilisation. Il peut aussi faire des demandes de modification ou de suppression.
Quand on leur demande si elles pensent que leurs outils d’analyse actuels sont conformes avec la loi 25, 38 % des entreprises disent répondent « oui pour certains outils, nous devons valider pour le reste ». Près du tiers des répondants (31 %) disent non ou « je ne sais pas », alors que 16 % doivent valider avec leurs fournisseurs pour répondre. Dans 15 % des cas, les entreprises disent « oui » pour tous leurs outils.
Source : Varibase
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