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Par : Molly Killeen | EURACTIV.com | translated by Erika Kadlcikova
12-01-2023 (mis à jour: 12-01-2023 )
Dans une décision initiale publiée mercredi (11 janvier), la Bundeskartellamt a conclu que, au vu de ses conditions actuelles, Google est en mesure de collecter et de traiter des données provenant de ses services et de fournisseurs tiers sans le consentement des utilisateurs. [SHUTTERSTOCK/nitpicker]Langues : English

L’autorité allemande chargée de la concurrence, la Bundeskartellamt, a épinglé Google sur ses conditions de traitement des données, qui doivent selon cet organisme de surveillance être modifiées.
Dans une décision initiale publiée mercredi (11 janvier), la Bundeskartellamt a conclu que, au vu de ses conditions actuelles, Google est en mesure de collecter et de traiter des données provenant de ses services et de fournisseurs tiers sans le consentement des utilisateurs. L’autorité allemande appelle donc Google à modifier son mode de fonctionnement.
L’action menée par la Bundeskartellamt est fondée sur la législation allemande relative à la concurrence et repose sur un amendement de janvier 2021 à la loi allemande sur la concurrence (Gesetz gegen Wettbewerbsbeschränkungen, GWB). Cet amendement vise à garantir une action plus efficace contre les grandes entreprises numériques.
Des mesures comparables à la décision devraient également être introduites au niveau européen avec la loi sur les marchés numériques (Digital Markets Act, DMA), qui entrera en vigueur le 2 mai 2023.
« Le modèle économique de Google repose en grande partie sur le traitement des données des utilisateurs. En raison de son accès établi aux données pertinentes recueillies auprès d’un grand nombre de services différents, Google bénéficie d’un avantage stratégique par rapport aux autres entreprises », explique Andreas Mundt, président de la Bundeskartellamt.
« Les pratiques de Google doivent être évaluées par rapport aux obligations fixées par les nouvelles règles de concurrence applicables aux grandes entreprises numériques. L’entreprise doit offrir aux utilisateurs un choix suffisant sur le traitement de leurs données. »
La Bundeskartellamt constate que les conditions d’utilisation des données de l’entreprise permettent à cette dernière de regrouper des données provenant de plusieurs sources différentes pour établir des profils utilisateurs détaillés qui peuvent être utilisés à des fins de publicité ou d’amélioration des fonctionnalités de leurs services.
Ces données proviennent de services du géant technologique, tels que Google Search, YouTube et Google Maps, ainsi que des sites et applications tiers et des données en arrière-plan, tels que Google Play, qui collectent également des données sur les appareils Android.
L’organisme de surveillance déclare être parvenu à la conclusion préliminaire que les conditions actuelles n’offrent pas aux utilisateurs un choix suffisant pour consentir ou refuser ce traitement des données à travers les services.
« Les choix proposés jusqu’à présent, dans la mesure où ils existent, sont insuffisamment transparents et trop généraux », affirme l’autorité allemande, qui affirme également « envisager à l’heure actuelle d’obliger l’entreprise à modifier les choix proposés ».
Pour que le choix soit jugé suffisant, les utilisateurs doivent pouvoir choisir de limiter le traitement de leurs données recueillies par des services spécifiques et pouvoir distinguer les différentes fins auxquelles les données seront utilisées.
L’organisme de surveillance indique que les choix offerts ne doivent pas non plus être configurés pour permettre aux utilisateurs d’approuver plutôt que de refuser cette collecte de données.
En outre, la décision précise que « la conservation et le traitement des données de manière générale et indifférenciée à travers les services sans motif spécifique à titre préventif, y compris à des fins de sécurité, ne sont pas non plus autorisés sans que les utilisateurs aient le choix [d’y consentir ou non] ».
« Les utilisateurs comptent sur nous pour opérer de manière responsable — à la fois en continuant à offrir des expériences utilisateurs [satisfaisantes] et en mettant à jour nos services de manière continue pour répondre aux attentes des régulateurs », a confié un porte-parole de Google à EURACTIV.
« Nous continuerons à nous engager de manière constructive avec [la Bundeskartellamt] pour essayer d’apaiser ses inquiétudes. »
Cette déclaration constitue la première étape de la démarche administrative de l’organisme à l’encontre de Google, qui aura maintenant la possibilité de publier une réponse justifiant sa démarche ou proposant des solutions pour répondre aux préoccupations de la Bundeskartellamt.
Cette affaire devrait être conclue cette année.
Les conclusions de l’organisme allemand chargé de la concurrence sont fondées sur un nouvel amendement à la loi allemande sur la concurrence, conçu pour garantir une surveillance plus efficace et plus simple des principaux acteurs du marché numérique.
La section 19a, qui est entrée en vigueur en janvier 2021, permet à la Bundestkartellamt de définir certains acteurs comme ayant une « importance considérable pour la concurrence sur les marchés » en se fondant sur des éléments tels que leur positionnement sur celui-ci, leur solidité financière, leur intégration et leur accès aux données.
En 2021, la Bundeskartellamt a conclu que c’était le cas de Google, ce qui signifie que les autorités ont le pouvoir d’intervenir pour l’empêcher de s’engager dans des pratiques anticoncurrentielles.
La Bundeskartellamt relève par ailleurs que, même si la décision est fondée sur la législation allemande sur la concurrence, des dispositions comparables sont comprises dans le DMA au niveau de l’UE et devraient concerner certains des services de Google à l’avenir.
La législation allemande, et plus particulièrement la section 19a, a été considérée comme un modèle pour le DMA. Cette situation a soulevé des questions sur les efforts d’harmonisation futurs et sur la relation entre les organismes de régulation de la concurrence nationaux et les responsables de l’application du DMA au niveau européen.
Toutefois, l’organisme constate dans sa déclaration que la législation allemande dépasse partiellement les obligations prévues par le DMA lorsque ce dernier entrera en vigueur cette année. En effet, les dispositions du règlement sur le traitement des données entre les services ne seront applicables que si des services de plateforme essentiels, qui doivent encore être définis par la Commission, sont impliqués.
La loi européenne sur les marchés numériques (DMA), législation phare visant les géants de la technologie, sera complétée par des autorités de la concurrence au niveau national. En Allemagne, le Bundeskartellamt revendique déjà son champ d’action vis-à-vis du régulateur européen.
[Édité par Anne-Sophie Gayet]
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