Anne, jeune trentenaire et grande utilisatrice d’Instagram depuis 7 ans, a récemment supprimé sans regret son compte : « J’en avais marre du contenu avec trop de publicité, trop de gens qui s’affichent et des vidéos pas représentatives de la vraie vie. Je prends désormais des nouvelles directement auprès de mes amis ». Impossible de quantifier si un mouvement de fond et d’abandon d’ « Insta » s’est enclenché mais il suffit de faire un tour dans les commentaires des magasins d’applications iOS et Android pour avoir une idée de la frustration des utilisateurs, mise à jour après mise à jour.
Les critiques les plus récentes appellent tout bonnement à un retour à l’ancienne version de la plateforme. « On ne peut même plus voir les photos de nos amis, chose pour laquelle on a téléchargé Instagram à la base », se plaint, par exemple, Ayaam59 sur l’App Store.
Dédié à la photo d’artiste à ses tout débuts, Instagram a évolué étape par étape vers la monétisation. « Instagram est un site où partager et voir de belles photos créatives prises de partout dans le monde », nous expliquait en 2015 l’un de ses créateurs Kevin Systrom, qui a fini, dépité par la stratégie, par quitter le navire racheté par Meta (ex-Facebook) en 2012.
« L’histoire de Facebook se répète avec un réseau social gratuit au début qualitatif et communautaire qui devient un site promotionnel au fur et à mesure qu’il devient très grand public et que les marques consacrent beaucoup d’argent à y être omniprésentes », constate Julien Pillot, professeur en économie numérique et stratégie à l’école de commerce INSEEC. « La monétisation a mené progressivement à pousser en avant plus de publicité et de contenus d’influenceurs qui sont de la publicité déguisée », juge l’expert.
Incontournable et rentable pendant des années, la plateforme des photos avec un joli filtre n’a pas vu arriver dans le rétroviseur un nouvel acteur qui l’a pris de court alors que Snapchat et ses vidéos éphémères avait déjà un peu ébranlé son statut. Boosté par les confinements de 2020, le bulldozer chinois TikTok et ses vidéos en format vertical a tout écrasé sur son passage et récupéré une génération d’adolescents malgré des débuts critiqués.
« Les Américains se sont pour une fois fait doubler par les Chinois et ont dû s’adapter pour garder les annonceurs face à cette nouvelle concurrence », souligne Thomas Fauré, patron du réseau social d’entreprise français Whaller. « Meta s’est fait dépasser par son propre modèle économique où l’attention et l’agrégation de données sont essentielles pour vendre de la publicité. Ils ont donc dû modifier en urgence les algorithmes de recommandations pour pousser des vidéos en format court qui plaisent » analyse-t-il.
« La mise en avant algorithmique fait la part belle à des contenus dynamiques qui attirent davantage l’œil et génère plus d’engagement, le nerf de la guerre pour les réseaux sociaux qui vendent de l’attention à leurs clients », complète l’enseignant-chercheur Julien Pillot. La plateforme au 1,4 milliard d’utilisateurs quotidiens entend ainsi séduire et retenir les plus jeunes habitués au format TikTok. Quitte à ce qu’ils jonglent entre les deux applications.
« Les Reels continuent à être une partie importante et en pleine croissance d’Instagram », reconnaît un porte-parole de Meta. « Nous avons sur l’année écoulée annoncé que nous allons nous concentrer sur la simplification de la création de vidéos et investir plus dans les Reels », explique la maison mère.
Le phénomène devrait en effet s’accentuer car Instagram a annoncé ce jeudi que les vidéos de moins de 15 minutes, la grande majorité des contenus, seront à l’avenir partagées dans le format Reels, les vidéos de 15 secondes, lancé en août 2020 pour contrer la montée en puissance de TikTok… avec un effet jusqu’à présent limité.
Guide Shopping Le Parisien
Offres d'emploi
Codes promo
Services
Profitez des avantages de l’offre numérique
© Le Parisien

source

Catégorisé: