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Si certains ont pointé du doigt la supposée influence des lobbies, la profession plaide l’application de la législation sur la publicité comparative. Retour sur la condamnation de Biocoop avec son directeur de la communication, Patrick Marguerie, et Thierry Wellhoff, fondateur de l’agence Wellcom.
Jusqu’où peut aller la publicité comparative ? C’est avec cette limite qu’a flirté Biocoop, condamné le 21 septembre 2016 pour dénigrement et appel au boycott. En cause, une campagne de publicité signée Fred&Farid Paris, déployée en affichage, en presse et en ligne mi-septembre 2014. Après un premier rejet de la procédure en référé, le Tribunal de Grande Instance de Paris a finalement satisfait l’assignation en justice de l’Interfel (association interprofessionnelle de la filière des fruits et légumes frais), l’ANPP (un producteurs de pommes) et la FNPF (Fédération Nationale des Producteurs de Fruits). Si le caractère trompeur de la campagne n’a pas été retenu (les visuels mentionnant un rapport Ecophyto R&D INRA publié en janvier 2009), c’est bien l’aspect dénigrant du montage visuel (décliné pour des fraises, des oeufs et du riz) et de l’injonction “N’achetez pas” qui a motivé la décision du jury. Qu’en pensent le principal intéressé et la profession ?
A l’annonce de la condamnation, les réactions ne se sont pas faites attendre, certaines voix, dont une majorité de sites média spécialisés dans le bio, comparant les associations demanderesses à des lobbies capables d’influencer les décisions de justice. L’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) souhaite cependant éviter tout “mauvais procès à l’indépendance de la Justice”, rappelant que cette dernière s’appuyant sur la législation en vigueur concernant la publicité comparative. Laquelle stipule que ce procédé publicitaire ne peut “entraîner le discrédit ou le dénigrement des marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens, services, activité ou situation d’un concurrent”. D’autant qu’à la sortie de la campagne, le Jury de Déontologie Publicitaire (instance de l’ARPP) avait émis un avis négatif (mais non coercitif) quant à un visuel sur les cosmétiques non bio, suite à sa saisie par la Fédération des Entreprises de la Beauté (Febea). L’annonce du jugement du TGI n’a pas surpris outre-mesure Biocoop, comme le justifie son directeur de la communication, Patrick Marguerie : “lorsque l’on adopte une posture militante comme Biocoop, on s’attend toujours à ce genre de réaction de la part des acteurs du marché”.
La marque reconnait néanmoins une certaine maladresse dans la forme “sans doute perfectible”. Une stratégie jugée que Thierry Wellhoff, fondateur et président de l’agence Wellcom, juge “contre-productive” en raison du “message négatif” diffusé par la campagne, malgré “la posture légitime et référente de Biocoop sur le discours du bio”. Car en critiquant les pommes traitées plutôt qu’en mettant en avant les bienfaits des pommes bio, le communicant considère que l’enseigne fait preuve d’une certaine forme d’arrogance qui va à l’encontre des valeurs véhiculées par le bio. Ce qu’il qualifie de “publicité Canada Dry” : “cette campagne a la couleur de la communication responsable, elle a le goût de la communication responsable… Mais ce n’est pas de la communication responsable”.
Lire aussi : Arbre Vert Chocolat Ethiquable et Biocoop le palmares des marques engagees
Bonne joueuse, l’enseigne estime que la sanction est “cohérente”, tirant même parti de la nature de la condamnation. D’après Patrick Marguerie, en attaquant la forme, après avoir été déboutées sur le fond, ” les associations valident le message, qui est qu’en moyenne une pomme non bio contient 28 pesticides “, la campagne de publicité créée par Fred&Farid s’appuyant sur des données chiffrées de l’étude de l’INRA. Et c’est là le combat que mène Biocoop : la sensibilisation du grand public à la question des traitements chimiques dans l’agroalimentaire pour l’amener à faire un choix en connaissance de cause. “Biocoop se positionne comme un lanceur d’alerte”, ajoute Patrick Marguerie, qui souligne la viralité de la campagne, qui a largement gagné en visibilité suite à la condamnation de la marque. ” Ce qui nous intéresse, c’est que nos arguments soient relayés auprès d’un maximum de personne”, détaille le directeur de la communication. Mission réussie suppose Thierry Wellhoff, face à la vague de soutiens affichés suite à la condamnation de l’enseigne. D’autant que le montant de l’amende infligée (30000euros de préjudice et 9000euros de publication du jugement) parait symbolique pour cet acteur du bio qui possède 400 boutiques en France et qui a réalisé un chiffre d’affaires de 768 millions d’euros en 2015.
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