Mot fourre-tout, le conseil s’il ne veut pas devenir un mot "éponge" doit se réinventer. Issu d’une histoire millénaire qui a su émerger dans une société américaine des années 1900 avec James McKinsey, le conseil est devenu par la durée victime de son succès faisant naître une forme d’absurdité. Qu’est-ce qu’un conseil ?
D’abord réalisé par la parole, le conseil s’inscrit par suite dans l’écriture avant de devenir un métier. Autrement dit, le conseil provient du latin consilium qui est une délibération exprimée pour faire ou ne pas faire. L’antinomie naît alors où les cabinets ne conseillent plus mais deviennent les acteurs de leur conseil, pour mieux dire, c’est une véritable usine de sous-traitance qui naît de consultants indépendants utilisant des abréviations et des anglicismes pour se rassurer se voyant à la quête de son sens.
Le conseil vit dans les interactions humaines, en ce sens intemporel Corneille se moque des décideurs et écrit dans Héraclius « demain je ne prends conseil que de moi-même » qui marque la fin de l’échange avec autrui. Le conseil est souvent présent quand les faits sont importants, parce que nous nous défions de nos propres lumières. Ainsi, ce métier en devenir avec un salaire net moyen de 3 550€ comportant 300 000 consultants indépendants en France se voit être l’aune de la santé économique des auto-entrepreneurs du pays.
Dans un autre axe, l’autonomie du consultant est un facteur appréciable du client compris par le philosophe John Stuart Mill dans son ouvrage De la liberté, « il est impossible d'être un grand penseur sans reconnaître que son premier devoir est de suivre son intelligence, quelle que soit la conclusion à laquelle elle peut mener ». Autrement dit, l’indépendance permet un éclaircissement tout à fait objectif où la médiocrité dans les actes politiques ou plus largement les opinions, prend essence en ne se laissant pas guider par les conseils.
Le monde du conseil peut s’avérer rugueux faisant entrer l’individu dans un conformisme prêt à se comporter d’une manière discordante avec son soi en un sens kantien. C’est pourquoi l’affirmation de soi est un thème récurrent dans le monde du conseil, plaçant le talent oral au détriment de l’écrit dans un esprit de synthèse projeté sur une slide. La communication entre conseillers peut s’avérer difficile lorsqu’à chaque mission c’est le client qui choisit l’équipe et non le manager. Pour mieux dire, une isolation et une déconnection de toute réalité se fait ressentir, acheminant à des horaires qui ne font plus voir le soleil. C’est la vieille valorisation calviniste de l’effort qui s’entrevoit où la valorisation de l’endurance morale se fait par rapport à la paresse et à l’abandon. C’est ce qui conduit les consultants à être très courtisés, on peut lire dans un papier du Figaro vis-à-vis du conseil « en 2021, le marché français a regagné +12% après le recul de 2020. Aujourd'hui, il est même au-dessus de son niveau d'avant-crise », Matthieu Courtecuisse, président de l'organisation qui représente les professionnels du conseil en France. C’est ainsi que Global Research indique que deux cabinets sur trois disent manquer de main-d’œuvre. Historiquement, le turn-over est l’une des plaies dans le domaine du conseil alors même qu’il est intrinsèque à lui-même : le conseiller change de mission comme il change de cabinet.
De même, les revendications de pouvoir conduire sa propre vie n’a jamais été aussi forte, se traduisant par une flexibilité accrue faisant naître un esprit « start-up nation » qui n’est que de façade. Ainsi, l’autonomie accrue et la responsabilité de soi se voit vecteur de bonheur et de progrès, pour autant que le consultant se montre conciliant avec le client jusqu’à son épuisement. Vidé de son énergie et de son sens, le consultant tire sur la corde devenant un survivant, autrement dit un sur-vivant qui se rapproche dangereusement du burn-out. En ce sens, plusieurs cabinets autorisent un consultant à se mettre en retrait sur une mission ou plus largement du cabinet afin de retrouver goût au travail.
Aussi, le conseil accentue la fragilisation de l’emploi, pour reprendre la phrase de Hayek dans La route de la servitude « en assurant les revenus des uns, on rend la situation des autres de plus en plus précaire », autrement dit, le fait d'externaliser à outrance crée une instabilité de l’emploi sur le modèle anglo-saxon.
Deux axes révolutionnent le métier de consultant : la technologie et la RSE. Comme tout métier de service, la technologie a accru le travail à distance créant un véritable bouleversement : 31% des salariés français travaillent à distance pour une satisfaction de 7,2/10 selon une étude de Malakoff Humanis de 2021. C’est dans cette question de temps que les horaires à rallonge sont de plus en plus soutenables. De même, la RSE dans les métiers de conseils chamboule l’ensemble des missions avec un point de vue éthique apporté dans les affaires.
La génération Covid qui se déploie sur le marché du travail va connaître un cycle de réindustrialisation ainsi qu’une valorisation des compétences transversales – les entreprises vont demander une compétence polymorphe qu’apporte le conseil de son œil externe. A force d’être démocratisé pour tout, le conseil se perd dans une logorrhée sans sens. Ainsi, le conseil implique la connaissance qui est universelle, détenue par tous. Autrement dit, la phrase de Molière dans Sicilien s’incarne ici « je suis homme aussi de conseil » c’est-à-dire que le conseil peut se voir donné par tous seulement sur des sujets précis. C’est le souci de la légitimité, de la crédibilité qui est remise en question impliquant non pas seulement le fond mais également la forme. Ainsi, la manière de présenter les éléments grâce à un ton adapté permet de s’adresser au client en le mettant à l’aise. Deux critères sont essentiels pour prendre forme comme expliqué dans l’ouvrage du bien-être au marché du malaise de Nicolas marquis: d’une part, le caractère raisonnable des propos tenus par le consultant, d’autre part la perception du client de considérer le consultant comme un individu adulte et autonome, capable de libre arbitre. L'apothéose de la crédibilité se trouve dans l’admiration des anciens pairs consultants qui s’étaient autrefois montrés circonspects voire moqueurs.
C’est dans cette perspective que se voit apporter quelques réflexions afin d’améliorer le métier de conseil. En ce sens, pour être attractifs vis-à-vis des talents, les cabinets de conseils se doivent de modifier leurs critères de recrutement tout en conservant l'aspect sélectif et donc prestigieux du métier. Les écoles sont bien trop misent en avant et implantées au détriment des Universités qui incarnent pourtant l’égalité et la méritocratie française. Une autre idée qui révolutionnerait le métier de consultant est l’établissement d’un lien fort de confiance vis-à-vis des entreprises cotées grâce à une rémunération en actions de la société. Le cabinet serait payé en action où elle émet un conseil afin de montrer sa foi dans son travail. De même, il est intéressant d’ajouter une dimension éthique et faire retrouver son sens aux conseillers via des formations qui doivent s’accentuer pour, comme l’exprime Blaise-Pascal dans Les Provinciales « prendre conseil de la raison ». Une autre lumière serait d’apporter des conseils humbles dans une volonté de prudence et de doute pour parfaire un bon avis, retirant ici toute assurance radicale. Enfin, il ne faut pas ignorer que le conseil est lié à la gestion, et que le suprême de cette discipline est la politique qui fixe les règles du métier. Les conseillers ne sont dans ce domaine pas assez représentés.

D’abord réalisé par la parole, le conseil s’inscrit par suite dans l’écriture avant de devenir un métier. Autrement dit, le conseil provient du latin consilium qui est une délibération exprimée pour faire ou ne pas faire. L’antinomie naît alors où…
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