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Marques, ne soyez plus AFK ! Grâce à ses audiences et à des tickets d’entrée peu onéreux, l’eSport a la cote. Reste aux annonceurs à s’emparer des codes et à sélectionner les bons interlocuteurs d’un secteur encore peu structuré. Voici un petit tutoriel à lire avant de vous lancer.
L’eSport n’est plus pris à la rigolade, mais pour beaucoup d’annonceurs, le milieu relève d’une terra incognita au langage exotique, à l’instar d’AFK, acronyme de “Away From Keyboard” [loin du clavier, se dit d’un joueur absent de la partie, NDLR]. Ce qui est le cas de moins en moins d’acteurs. “Le gouvernement s’est emparé du sujet [le statut de joueur professionnel est encadré depuis le 1er juillet 2017] et la visibilité médiatique sort l’eSport de son positionnement de niche. En France, on ne voit pas encore de chaînes de télévision retransmettre en direct des compétitions, mais Canal+ et BeIN y consacrent des émissions. Il y a les Web TV et les sites spécialisés comme Eclypsia, Millenium ou O’Gaming, mais aussi Twitch et de nombreux streamers en France“, énumère Audrey Fleury, cofondatrice de Digital Insighters, spécialiste du social data intelligence qui vient de lancer Spawnly, sa section consacrée à ce segment. 4,5 millions de Français consomment des contenus liés à l’eSport, selon le secrétariat d’État au numérique. 7,5 millions selon Webedia, référence hexagonale du secteur. Ce printemps, Médiamétrie indiquait qu’un internaute sur deux connaissait l’eSport, et qu’un sur six regardait régulièrement les compétitions. Côté jeu, c’est sans conteste League of Legends (LoL), titre emblématique, qui draine le plus d’audience: en mai dernier, 364 millions d’internautes ont regardé les 15 jours de compétition du Mid-Season Invitational 2017, l’un des principaux tournois. Le problème, c’est qu’on ne fait ici qu’effleurer la complexité du secteur, ses audiences multiples, ses jeux inédits et ses nouvelles compétitions, sans oublier ses références culturelles. Un annonceur doit avancer avec prudence, faute de quoi il provoquera au mieux l’indifférence de la communauté, au pire, son rejet.
Pour aller plus loin :
eSport, une cible de 7,5 millions de fans en France
“Il y a encore une méconnaissance de la part des planneurs stratégiques et des créatifs. Les marques côtoient des organisateurs d’événements, des médias spécialisés ou des agences d’influenceurs. Elles ont trop peu d’insights sur le marché et de recul pour traduire leur ADN de marque et leurs valeurs en des termes compatibles avec le langage eSport. C’est pourtant la meilleure façon de paraître légitime auprès de ses fans“, constate Mathieu Lacrouts, cofondateur de l’agence publicitaire spécialisée Hurrah. Il recommande de se tourner vers l’interne: “Il y aura toujours au moins un stagiaire capable d’aider une fois par semaine les équipes marketing à comprendre l’eSport.“ Des initiatives comme les tournois organisés par Voyages-sncf ou Orange servent ainsi des objectifs de communication, mais permettent aussi d’identifier ou d’attirer de futurs ambassadeurs.
Lire aussi : Quelles sont les bonnes pratiques pour integrer eSport et le gaming son mix marketing
“Il y aura toujours au moins un stagiaire capable d’aider une fois par semaine les équipes marketing à comprendre l’eSport.”
Étape 2 : prendre la température auprès des fans
Une fois les bases de la culture eSport acquises, un annonceur peut envisager différentes actions pour toucher la communauté. “Le sponsoring est souvent la première clef pour pénétrer le secteur. Les tickets d’entrée augmentent mais restent relativement accessibles. Les annonceurs s’offrent une visibilité à moindre coût et peuvent moduler leurs investissements en sponsorisant un streamer, une équipe ou un événement“, explique Audrey Fleury. Mathieu Lacrouts confirme: “Pour quelques dizaines de milliers d’euros, sponsoriser un streamer reste un bon moyen de prendre la température, d’investir dans le temps sans développer pour autant sa propre stratégie de contenu.” Via son accord de naming avec l’eLigue1 lancée en début d’année par la LFP, Orange veut accompagner ses initiatives dans le football ou le rugby: “Se positionner sur FIFA et l’eLigue1 a du sens car nous avons la légitimité. Ce partenariat vient plutôt nourrir notre positionnement auprès des fans de foot que des fans d’eSport“, explique Stéphane Tardivel, directeur sponsoring à la direction de la communication d’Orange France. Les fans d’eSport sont ciblés via Webedia et le sponsoring de la team Millenium. “Webedia a beaucoup d’assets: ils organisent des compétitions comme les ESWC, possèdent des médias de référence (Millenium, Jeuxvideo.com) et collaborent avec de nombreux influenceurs via l’agence Bang Bang Management“, détaille Mathieu Lacrouts.
Pour aller plus loin :
Les Casinos Barrière misent sur l’e-sport pour séduire les millennials
Orange s’est rapproché de la Stream Team: l’opérateur équipe la gaming house des influenceurs, qui sont conviés sur ses stands lors des grands rassemblements de l’eSport et animent ses opérations en ligne. Lesquelles sont menées sous la marque Orange Rush eSport. “Les influenceurs ont plus d’impact sur les réseaux sociaux, et sont plus crédibles pour évaluer la qualité de notre réseau haut-débit“, avance Stéphane Tardivel. Au-delà des contenus et des bons plans proposés lors d’opérations spéciales avec Ouigo ou AlloResto, la plateforme permet à l’opérateur d’amplifier la portée de ses actions de sponsoring. C’est aussi un moyen de mesurer l’efficacité des investissements sur le long terme reconnaît Stéphane Tardivel. Idem chez Coca-Cola, qui sponsorise les championnats du monde de LoL depuis 2012. “En Corée, ils ont lancé des packagings à l’effigie des stars de LoL. Ils ont aussi un compte Twitter, Coke Esports, qui rassemble plusieurs centaines de milliers de followers ; une Web TV, Esports Weekly, qui débriefe l’actualité du milieu en anglais ; ou encore leur chaîne YouTube CokeTV, qui produit des contenus gaming et eSport avec des influenceurs“, détaille Audrey Fleury. Les plus investis développant leurs propres événements: les Casinos Barrière avec les shows Barrière eSport Tour, La Française des Jeux et sa FDJ Masters League sur Street Fighter V ou TF1, viasa plateforme MyTF1 Xtra et ses Xtra Cup en sont les exemples. Ces opérations se justifient quand on a besoin d’attirer de nouvelles audiences ou que l’on cherche à se positionner sur un nouveau jeu: précurseurs, les Intel Extreme Masters (Counter Strike) ou le Red Bull Kumite (Street Fighter) sont désormais des références. Sans cela, “autant sponsoriser une compétition en ligne via Glory4Gamers“, juge Mathieu Lacrouts.
Lire aussi : Nicolas Favre directeur marketing de Team Vitality eSport est la recette magique
“Coca-Cola organisait l’an dernier des “viewing parties”, des compétitions d’eSport diffusées dans des cinémas.”
Existe enfin une dernière possibilité. Avec l’opération Wildest Fans, Nestlé et Hurrah ont misé sur un dispositif mixte: plus profond que du sponsoring et de l’achat média, moins engageant que la mise en place d’une plateforme ou l’organisation d’un tournoi. Les 100 supporteurs aux couleurs de la marque céréales Lion envoyés aux championnats d’Europe de League of Legends ce printemps ont offert une belle visibilité à la marque, qui a bénéficié de l’absence de sponsor officiel. “Nestlé voulait développer un aspect communautaire tout en produisant du contenu“, explique Mathieu Lacrouts, qui cite d’autres exemples d’actions réussies: “En parallèle du sponsoring, Coca-Cola organisait l’an dernier des “viewing parties”, soit la retransmission de compétitions d’eSport dans des cinémas.“ Ces opérations expérientielles peuvent se développer “in-game” en proposant par exemple aux fans de personnaliser leur personnage aux couleurs de la marque. “Sur League of Legends, cette possibilité n’est pour le moment ouverte qu’aux équipes professionnelles mais on peut imaginer que demain, il sera possible de croiser des joueurs aux couleurs de Coca-Cola. C’est le même principe que les marques qui sponsorisent un filtre sur Snapchat”, remarque Audrey Fleury. Autre exemple: pour promouvoir la sortie du dernier film Fast & Furious, une opération a été montée avec le jeu Rocket League, qui mêle football et course auto: un contenu additionnel payant pour jouer avec les voitures du film. Pour Mathieu Lacrouts: “Cela ne coûte rien à la marque qui ne donne qu’une licence à l’éditeur, lequel s’y retrouve sur les ventes. C’est malin, et plutôt que de sponsoriser le tournoi d’un jeu de voiture, ils ont innové.“
Pour aller plus loin :
eSport : Nestlé et Lion font rugir de plaisir les fans de League of Legends
Les conseils à retenir pour vos premiers pas
Soutenez un influenceur: c’est un bon moyen d’en apprendre plus sur le secteur et de tester la réaction de la communauté à votre marque.
Recensez les fans d’eSport en interne: ils vous aideront à comprendre le secteur et à identifier ses nouvelles tendances.
Traduisez votre image de marque: il faut s’approprier les codes des fans d’eSport pour être légitime à leurs yeux.
L’atelier “Comment intégrer l’eSport dans votre mix-marketing” est issu du numéro 203 de Marketing Magazine.
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