Le cabinet Forrester Research définit les DMP de la façon suivante:
Forrester Research defines a DMP as « a unified technology platform that intakes disparate first-, second-, and third-party data sets, provides normalization and segmentation on that data, and allows a user to push the resulting segmentation into live interactive channel environments.”
C’est clair et concis : une Data Management Platform est une plateforme technologique capable d’ingérer des données 1st, 2nd et 3rd Party, d’offrir des capacités de normalisation (ou déduplication) et de segmentation sur la base de ces données, et de permettre à ses utilisateurs d’envoyer les segments d’audiences qui en résultent vers des canaux d’activation.
J’en profite pour vous signaler au passage que Forrester Research a publié deux études sectorielles sur les DMP du marché ; la première en Q3 2013 et la plus récente en Q4 2015. La seconde est proposée par Adobe.
On trouve actuellement sur le marché plusieurs offres d’éditeurs de solutions DMP : certains acteurs sont internationaux, d’autres plus locaux ou nationaux ; certaines solutions peuvent être qualifiées de « Pure Players », d’autres étaient initialement des 3rd Party Data Providers ou bien des DSP qui ont étoffé leur offre en y ajoutant une couche de services DMP. Quoi qu’il en soit, une plateforme DMP repose généralement sur les quatre piliers suivants :
DMP
1 – Collecte de données : des mécanismes de collecte de données 1st party en temps-réel, le plus fréquemment via un « tag DMP » travaillant au niveau de la page d’un site Web, ou via un SDK pour les apps mobiles, ainsi que des mécanismes d’ingestion de données offline (cas typique des données CRM)
2 – Unification des profils et « ID Sync » des sources de données au niveau d’un individu autour d’un identifiant unique : ce qui suppose donc gérer des partenariats techniques avec un grand nombre d’acteurs
3 – Capacités de segmentation : segmentation manuelle via un éditeur de règles, ou bien segmentation algorithmique (segmentation automatique, look-alike modeling)
4 – Activation des segments d’audience : la capacité à « envoyer » les segments d’audience vers différents types de destinations d’activation : plateformes publicitaires et solutions de ad-tech, moteurs de personnalisation de contenu Web, solutions de marketing direct type ESP, etc ; Ce qui suppose là encore autant de connecteurs techniques et de relations de partenariat à gérer.
Et tout ceci en étant un maillon de la chaine programmatique RTB : ce qui suppose de disposer d’une technologie permettant de stocker des quantités gigantesques de données, de supporter les pic de charge importants notamment pendant les grands moments de chalandise (pensez aux fêtes de fin d’année, au Black Friday, etc.) tout en respectant les temps de réponses exigés pour pouvoir opérer dans la chaine du « Real Time Bidding ».

Schématiquement, toute donnée anonyme non nominative se rapportant à un individu peut être intégrée dans une DMP. Quand il s’agit de parler des données dans une DMP, on a l’habitude de parler de données « first party », « second party » et « third party ». Que sont-elles au juste ?
Les données 1st Party sont toutes les données qui vous appartiennent en tant que marque : ce sont les données que vous pouvez directement collecter du fait de l’activité sur vos sites Web, ou dans vos apps mobiles, ou bien les données que vous possédez dans vos bases markéting, systèmes CRM, ou autres programmes de fidé. Il peut s’agir de données online (web ou mobile), offline (CRM), de données socio-démo, de données comportementales ou bien encore d’intentions d’achat, par exemple.
Les données 2nd Party sont essentiellement comme des données 1st Party, sauf que vous les collectez depuis des sites Web qui ne sont pas les vôtres, mais ceux de partenaires. Exemple : imaginez qu’une banque ou un organisme financier ait passé un accord d’échange de données avec un site d’annonces immobilières. Ainsi, les données de visite d’un individu sur le site d’annonces immobilières permettent d’en déduire une forte probabilité pour un projet d’achat immobilier, et un besoin de financement via un prêt immobilier. L’organisme financier aura ainsi collecté des données d’intention via son partenariat 2nd Party avec le site d’annonces immobilières.
Enfin, les données 3rd Party sont des données qui sont vendues – ou plus exactement louées à l’acte – par tout un ensemble d’acteurs du marché que sont les 3rd Party Data Providers. Par exemple : lorsqu’un prospect se présente sur votre site Web dans sa première visite, par définition on ignore tout de cette personne. Dans certains scénarios, il est utile de recourir à des données 3rd Party afin de caractériser ce nouveau visiteur inconnu afin de l’adresser de la meilleure façon possible, et ceci aussi tôt que possible.
A titre d’illustration, voici des exemples de quelques fournisseurs de données 3rd Party ayant une activité en Europe : Acxiom, AddThis, Eyeota, eXelate, VisualDNA.
NB : Je consacrerai un billet spécifiquement au sujet des données 1st Party vs 3rd Party : avantages et inconvénients des unes et des autres. A suivre.
Comme on l’a rapidement introduit dans le billet précédent, la DMP est l’un des maillons de la chaine programmatique RTB, d’un côté en amont des DSP (ou Demand Side Platforms) qui gèrent les demande de la part des acheteurs (les annonceurs) et de l’autre côté en amont des SSP (ou Supply Side Platforms) qui agrègent les inventaires publicitaires mis en vente sur le marché par les éditeurs. La vocation principale d’une plateforme DMP est donc d’opérer « mieux » ses campagnes digitales via des bannières. C’était tout du moins l’utilisation historique d’une DMP.
De nos jours, les DMP permettent non seulement de transférer les segments d’audience vers des destinations publicitaires (DSPs, SSPs, Adservers, AdExchanges, etc.) mais plus uniquement : les DMP permettent aussi d’activer ces mêmes segments d’audience on-site (via des moteurs de personnalisation de contenu ou de A/B testing), via les moteurs de recherche pour les campagnes SEM avec des formats tels que le RLSA de Google Adwords (= Remarketing Lists for Search Ads), via les réseaux sociaux via des formats de social advertising type Facebook Custom Audiences ou Twitter Tailored Audiences, des destinations mobiles (A/B testing dans le mobile Web, ou DSP mobiles), ou bien via des solutions d’ESP (= Email Service Providers) pour des scénarios de marketing direct (ici toutefois avec des restrictions d’usage, afin de respecter les règles de Privacy). Ainsi, il devient possible de présenter des messages, créas et des promos cohérentes à vos prospects ou clients sur l’ensemble des touchpoints.
De fait, une DMP reste un maillon de la chaine programmatique RTB, mais plus seulement. D’une certaine façon, on peut considérer la DMP comme ayant un rôle à jouer sur la majorité des canaux et touchpoints des prospects ou clients, que ce soit pour la collecte des données, ou bien pour activation des segments d’audience.
Historiquement, les DMP sont nées du besoin des Editeurs de pouvoir caractériser leurs audiences et mieux les monétiser.
Plus tard, avec l’essor du RTB, certains « gros » annonceurs ont vu en la DMP un moyen d’optimiser l’efficacité de leurs campagnes en ligne, par un meilleur ciblage, mais aussi une optimisation de la dépense de leurs budgets marketing, en réduisant autant que possible les dépenses en média pour des impressions non utiles : afficher une campagne d’acquisition à un client existant, afficher une promotion produit à un client ayant déjà converti, etc.
Avec d’un côté les acheteurs (annonceurs) et de l’autre les vendeurs (éditeurs) d’espaces publicitaires, on se doute que chacun va viser des objectifs différents, voire antagoniques.
Pour ce qui est des annonceurs, on peut citer comme principaux bénéfices escomptés de l’utilisation d’une plateforme DMP les points suivants :
° Gérer plus finement l’achat média RTB : diminuer autant que possible les impressions (payantes) inutiles
° Corolaire du précédent : moins d’impressions gâchées, égal un taux de conversion amélioré
° Permettre de gérer la pression marketing : inutile de bombarder 50 fois la même bannière ou la même campagne à un individu. Un prospect qui n’aura pas réagi au bout de 8 ou 12 impressions ne réagira certainement pas plus au bout de 50 impressions. Ca fait 40 impressions économisées, et un prospect qui ne va pas détester votre marque parce que vos pubs sont trop agressives et « collantes »
° Améliorer la cohérence des messages et des créas sur l’ensemble des touchpoints : display advertising, onsite, emailings, etc et le tout en contexte. Donc meilleurs taux de conversion
° Comparer les performances de plusieurs DSPs : puisque les DMP permettent d’adresser simultanément plusieurs plateformes d’activation avec les mêmes segments d’audience, elles permettent en quelque sorte de rendre les DSP interchangeables, en particulier sur les critères de coût / performance. On comprend alors que certains DSP aient pivoté vers une activité de DMP – parfois exclusive – afin d’augmenter l’adhérence de leurs clients
° Avoir une meilleure « connaissance » des profils de ses prospects et clients ; trouver des insights marketing
° Transparence et meilleur contrôle sur l’affectation et l’utilisation de ses budgets médias, et dans une certaine mesure reprendre un peu la main par rapport à ses agences médias tradi Si on veut parler de ROI (= Return on Investment), on comprend rapidement que le coût du projet DMP sera à mettre en regard des économies que celle-ci permettra de réaliser sur les budgets média. Ce qui explique aussi pourquoi les DMP ont d’abord eu du succès auprès des grandes marques, du moins celles qui dépensent le plus en programmatique.
Aussi, on observera que toutes les industries et tous les verticaux ne sont pas égaux face aux DMP : on l’a vu, la principale source de collecte de données ce sont les sites web et les apps mobiles des marques et entreprises.
D’un vertical à l’autre, il existe des différences parfois importantes en termes de durée des cycles de vente (par exemple entre de l’automobile et des CPG) ; mais aussi en termes de fréquence de visite des sites Web (entre un assureur et un voyagiste en ligne) ; mais aussi au niveau du parcours d’achat en ligne entre les biens physiques et les achats de produits ou services dématérialisés (opérateurs telco ; plateformes de streaming musicales ou vidéo ; etc.)
Le cas des éditeurs est différent : pour les éditeurs l’enjeu est de parvenir à mieux vendre – donc avec un CPM plus élevé – leurs inventaires publicitaires. Et c’est là que la DMP prend tout son sens.
Historiquement, les campagnes étaient vendues comme dans l’univers du « Print » par relation directe entre le média et l’agence média.
Ainsi, si je suis une marque de produits cosmétiques qui vise naturellement une cible féminine intéressée par les sujets de beauté et de mode, je vais logiquement me tourner vers des médias qui sont lus par ce type de population : je contacterais donc les régies publicitaires de médias tels que Elle, Glamour, Vogue ou bien encore Cosmo, Grazia, Marie Claire ou Modes & Travaux (bien que ces titres puissent avoir de positionnements en propre et avoir des audience plus ou moins en affinité avec mes produits). C’est la logique du Media Planning.
Une autre façon de faire, est le ciblage contextuel : je peux également toucher une audience majoritairement féminine sur les pages Mode & Beauté d’un média quelconque, pas nécessairement de la presse féminine ; ou bien si je vends de la mousse à raser, je vais plutôt cibler les lecteurs des pages « Sports mécanique » des magazines généralistes.
NB : On m’épargnera SVP les remarques me taxant de sexisme sur ces deux derniers exemples 🙂
L’idée de la DMP c’est pour un annonceur de pouvoir toucher une audience donnée, définie précisément par des critères propres socio-démo et/ou comportementaux et/ou d’intention, et ceci quel que soit le media, ou quelle que soit la thématique de l’article ou de la rubrique sur le site Web consulté. On parle alors d’ « audience targeting ». Ainsi, symétriquement les éditeurs peuvent désormais vendre à un CPM plus élevé l’accès à une audience qualifiée, et non plus simplement vendre un inventaire au volume, ou pire de se contenter de monétiser les invendus (on parle de remnant inventory) à la casse avec un CPM très bas.
Pour les éditeurs, les bénéfices escomptés d’utiliser une DMP sont donc les suivants :
° Passer d’une logique de media planning à une logique de d’audience targeting : c’est à dire de vendre l’accès à des audiences qualifiées au lieu de monétiser à la casse les invendus publicitaires (origine des ad-exchanges et du RTB), donc globalement monétiser leurs inventaires à un meilleur CPM
° Pouvoir répondre à n’importe quel brief spécifique d’un annonceur ou d’une agence media en définissant précisément l’audience ad-hoc, et en étant en mesure d’annoncer à l’avance et de façon précise l’audience potentiellement adressable
° Accessoirement réduire le nombre de tags tiers présents sur le site, ce qui a un impact sur le temps de chargement de la page, et donc sur le taux de rebond des visiteurs (or, on se souvient que moins de pages vues == moins d’inventaire publicitaire commercialisable)
On n’oubliera pas que les éditeurs ont été historiquement les premiers à utiliser les DMP.
La dernière étude Forrester Wave Data Management Platforms, Q4 2015 portait sur les solutions suivantes : Adobe Audience Manager (*) ; Cxense ; KBM Group (Zipline DMP) ; Krux ; Lotame ; Neustar (PlatformOne) ; Oracle (anciennement Bluekai). Etaient notamment absents de cette étude les acteurs plus locaux voire nationaux tels que Makazi, Weborama ou Ysance.
Bien que capable de collecter et de gérer d’importants volumes de données granulaires au niveau d’individus (anonymes), les DMP ne sont pas des solutions de « Big Data » ni des Datalakes.
D’un point de vue architectural, les DMP sont bien souvent des solutions « Full SaaS » reposant sur des infrastructures de Cloud Computing, et pouvant mettre en œuvre des technologies que l’on retrouve par ailleurs dans les Datalakes : Hadoop, Hbase, Map Reduce et consorts.
Pourtant, les DMP ne sont pas des Datalakes. Premièrement déjà, du fait qu’elles ne contiennent que des données anonymes par nature, ou bien des données anonymisées, ceci afin de respecter les règles de Privacy. Mais également parce qu’on n’y stocke généralement pas les données sous leur forme brute (détails des tickets de caisse, ou historiques d’achats au niveau SKU, historique et liste de coordonnées GPS, etc.) : on préfère généralement intégrer dans la DMP des données pré-traitées et mises en forme permettant d’être ainsi directement exploitables.
Ainsi, plutôt que le détail de l’ensemble des produits d’un ticket de caisse, on intègrera généralement des données concernant des catégories ou des familles de produits consultés ou achetés, plutôt que l’ensemble d’une liste de coordonnées GPS, on préfèrera l’information de la dernière zone géographique dans laquelle une personne a été vue, et plutôt qu’une date de naissance, on intègrera l’âge ou mieux encore, une fourchette d’âge pour une personne (ex : 29-35 ans).
La question du choix entre DMP ou Datalake ne se pose pas en ces termes : les deux solutions sont complémentaires. La DMP est par nature une source de choix pour la collecte de données 1st Party et peut alimenter le Datalake. Symétriquement, le Datalake peut être vu comme un référentiel de données de l’entreprise, et peut aussi alimenter la DMP avec des données provenant d’autres sources.
Enfin, une DMP n’est pas un outil de marketing one-to-one : bien qu’une DMP permette de collecter un grand nombre de données et d’informations au niveau d’un individu, et que certains parlent de “connaissance à 360°” : l’individu n’est intéressant que parce qu’il ou elle appartient à un groupe homogène : le segment d’audience.
Bonjour et merci pour cette article très complet. En tant que CSO et Co-Fondateur d’Ysance, qui est donc éditeur d’une DMP First Party, je voulais cependant revenir sur le propos « qu’une DMP n’est pas un outil de marketing one-to-one ». Ce n’est désormais plus le cas. Les DMP récentes, comme celle d’Ysance, vont au delà de ce que permet les DMP historiques, notamment américaines, qui viennent du monde de la publicité comme expliqué dans l’article, et qui « pouvaient se contenter » d’activer des macro segments d’audience. Les DMP modernes, qui ne sont pas Cookie Based, mais People Based, gardent précisément tout le détail des interactions et des transactions (comme le détail des pages vues ou les tickets de caisse en magasin) pour pouvoir construire des segments encore plus fin à même de porter des programmes marketing véritablement one-t-one. Il est ainsi possible de mettre en place parcours client Online/Offline totalement individualisés. Les ROI ainsi obtenus sont spectaculaires. Bref, les DMP se doivent aussi aujourd’hui de devenir des Customer Data Platform et afin basculer d’un marketing publicitaire à un marketing CRM.
Merci pour cette précision. Je pense que vous allez aimer mes prochains articles, dans ce cas 🙂
Tout d’abord, merci pour cet article que je comprends comme le premier d’une série.
En tant que CEO et fondateur de Squadata, également acteur du marché des DMP, je souhaiterais apporter quelques précisions : je ne crois pas qu’il y ait autant de DMP que de métiers mais que les particularités de chacun ne peuvent pas forcément entrer dans le moule d’une seule et unique solution (qu’elles soient Cookies ou Profile Centric).
C’est pour cela que certains continueront de construire leur propre DMP et que d’autres trouveront leur bonheur dans les solutions sur étagère , qu’elles soient hébergées ou embarquées.
Il est important quand on choisit un DMP de prendre en compte ses besoins actuels et futurs tant que possible. C’est un choix qui devra être assumé pendant une longue période.
Actuellement les DMP restent l’apanage des « grands comptes ». C’est d’ailleurs pour cela que nous nous efforçons de démocratiser les services rendus par une DMP.
Ludovic
Merci pour votre commentaire.
En effet, ce billet est le premier d’une série, en revanche ils sont destinés à être publiés sur mon blog. Aussi vous pourrez retrouver les suivants via ce lien : http://www.clauer.fr/category/advertising/programmatic/dmpseries/
Cordialement,
Christophe
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